Llewellyn BROWN : L’Esthétique du pli dans l’œuvre de Henri Michaux (« Bibliothèque des lettres modernes » 45), 2007, 232 p. ISBN 978-2-256-91123-1. Réimpression 2015 (ici).
Une étoffe, tendue sur un châssis, telle une tapisserie, présente un décor composé de diverses formes dont on discerne tant la composition d’ensemble que le détail. Pour peu que ce support fasse défaut, la surface se met à onduler, les formes se déforment, glissent et se perdent dans l’obscurité des plis, au point parfois de n’en laisser apparaître que des fragments.
Tel est le modèle topologique qui, selon la thèse de ce livre, structure la création de Henri Michaux. Le pli : un point d’obscurité d’où émane une force inouïe, instaurant un mouvement oscillatoire qui conduit — brutalement ou par glissement — du « dépli » des formes qui aspirent à leur consistance et à leur autonomie, vers leur destruction répétée dans le pli ; un lieu aussi de revirement qui incite au perpétuel renouvellement des formes dans leur multiplicité.
Cette structure oriente et permet de lire l’ensemble des œuvres de Michaux en tant que constructions non seulement signifiantes mais matérielles où se croisent, dans une profonde interdépendance, unité et multiplicité, errance et statisme, infinie souplesse et violence tranchante, opacité et lumière, compacité et légèreté aérienne…
Ce mouvement incessant change définitivement de statut dès lors qu’il se cristallise pour devenir représentation : ce moment proprement esthétique consacre la création dans sa singularité.
SOMMAIRE
Introduction
I. GENÈSE DU PLI I. Une Rondeur sans coupure — II. La Boule comme dénégation du mal — III. La Nomination.– 1. Obstacle et trou.– 2. Logique de la nomination.– 3. Le défaut de nom.– 4. L’échec des semblants : « Je vous écris d’un pays lointain ».– 5. Le nom et le pli : Biliouli-Liliouli.– 6. Le nom et le pli : Dovobo. -- IV. Les Semblants, la topologie möbienne et le pli. – 1. Le ruban de Möbius et le pli : des topologies contrastées.– 2. Le pli et l’incessant.– 3. Unité möbienne et multiplicité du pli. -- V. La Topologie du vers.– 1. Oblitération par le pli : « Emplie de ».– 2. Construire le repli : « Dans la nuit ».– 3. La puissance du renouvellement : « Mouvements ».
II. RENVERSEMENTS I. La Férocité du pli.– 1. Le naturel et son envers.– 2. La férocité du Maître.– 3. Vitesse et abstraction.– 4. L’adhésion au Maître féroce.– 5. Une lecture dépliée (1) : Un Certain Plume.— II. Dedans et dehors — III. Scission et périphérisme.– 1. La fuite en surface.– 2. L’insistance du pli.– 3. Une lecture dépliée (2) : « Les Hivinizikis » — IV. Fragmentation et vignettes — V. Une lecture dépliée (3) : le pli et l’aliénation (« Au pays de la magie »).– 1. L’entaille dans la réalité.– 2. Le point de maîtrise.– 3. Une réalisation positive.
III. SUBJECTIVITÉ I. Le Parasitage du langage et l’équilibre — II. L’Exorcisme.– 1. L’échec de l’exorcisme.– 2. Un point de rebroussement.– 3. L’écart salutaire.– 4. La force de l’exorcisme — III. Le Trait, le rythme, la danse, la musique.– 1. Le sujet fil-pli.– 2. L’écriture trace.– 3. Ravinement de la signification.– 4. Le trait de la peinture.– 5. Le trait binaire : affirmation de la subjectivité.– 6. Le trait, la musique, la danse – 7. Des traits aux ondes.– 8. Le trait et l’apparition.– 9. Trait, peinture, écriture — IV. La Chair pâtissante et la subjectivité exaltée.– 1. Dégagement et exaltation.– 2. Une lecture dépliée (4) : « Les Méidosems ».