Pour beaucoup, Francis Carco (1886-1958) est et restera le romancier du Milieu, l’amateur des bouges mal famés de la Place Blanche, de Pigalle et de la Butte Montmartre, le chantre gouailleur d’une faune interlope qui mêle apaches, marlous et femmes perdues, dans un Paris labyrinthique où les ors des Grands Boulevards peinent à tenir à distance la boue des fortifs. On ne compte plus les évocations de Carco qui reprennent la lettre adressée à Léopold Marchand dans laquelle il se promet « de foutre dans la gueule des bourgeois, des romans musclés et pourris dont ils se pourlécheront les babouines. » Cette image, sans être totalement erronée, ne rend que très partiellement justice à l’écrivain que fut Carco. À la fois à la marge et au centre du champ littéraire, Carco se tient au croisement des voies du succès commercial, de la respectabilité institutionnelle et de l’absolu littéraire. Nous entendons examiner le paradoxe Carco à travers les différents domaines de sa volumineuse production qui se ramifie dans le roman et la poésie, bien sûr, mais également dans la critique d’art, le reportage et les souvenirs littéraires : la prolixité de son écriture tend à oblitérer, aux yeux de la critique comme du public, un questionnement continu des formes et de leur légitimité, sous la bannière d’une modestie feinte ou sincère, démarche qui fait de Francis Carco un singulier minor dans le paysage des lettres de la première moitié du XXe siècle.
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Au printemps 1940 paraît dans les Nouvelles littéraires une enquête sur les écrivains étrangers, principalement romanciers, ayant choisi d’écrire leur œuvre en français : les « Conrad français ». Ultime manifestation du cosmopolitisme d’entre-deux guerres juste avant la Débâcle, ces entretiens défendent une vision de la littérature ouverte, donnant toute leur place à des écrivains aussi divers que Jean Malaquais, Irène Némirovski, Ernst Erich Noth, Green, Kessel, Troyat, entre autres, auxquels il convient d’ajouter bien d’autres, de Panaït Istrati à Victor Serge, de Romain Gary et Benjamin Fondane à Albert Cohen, de Nathalie Sarraute à Tristan Tzara… Sans eux, la littérature française n’aurait pas le même visage. Relire ces œuvres ensemble, non comme autant d’itinéraires singuliers mais pour ce qu’elles signifient collectivement, comble une lacune de l’histoire littéraire et conduit à repenser la période – d’autant que leur apport se continue bien au-delà de juin 1940, notamment à travers des textes d’une grande maturité littéraire, souvent novateurs, écrits pendant le conflit ou dans l’immédiat après-guerre, qui portent des regards lucides et déchirés sur la France de la Défaite et de Vichy, regards dont nous avons bien besoin aujourd’hui.
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Louise Colet n’est restée dans la postérité littéraire qu’en tant que maîtresse de Flaubert alors qu’elle a composé une œuvre remarquée : de la poésie, des romans, des récits de voyage, des textes biographiques, des enquêtes historiques. Si elle a beaucoup écrit pour la presse en rêvant de diriger sa propre revue, elle a tenu aussi un salon littéraire très couru. Ainsi s’est-elle imposée en figure incontournable du monde littéraire.
Malgré de nombreux reproches – on incrimine son éclectisme et fait d’elle un simple bas-bleu –, Louise Colet a laissé une œuvre qui mérite d’être relue. Si l’écrivaine compte aujourd’hui au nombre des minores de son temps, elle n’en est pas moins une figure qui illustre avec beaucoup d’intérêt le XIXe siècle. SOMMAIRE Introduction I. ÉCRIRE 1. « Et mon front couronné s’appuie au front du Temps » Trajectoire poétique de Louise Colet, par Antoine PIANTONI 2. Louise Colet et les conseils de Flaubert, par Éric LE CALVEZ 3. De quelques éléments de facticité dans le roman coletien, par Thierry POYET |
Homme d’influence, académicien, bien introduit dans les cénacles les plus courus, Maxime Du Camp a cherché à être une conscience de son temps en même temps qu’il a espéré peser de tout son poids sur la littérature en train de se faire. Porteur d’un point de vue original et complexe sur la vie littéraire entre 1850 et 1890, il reste incontestablement l’auteur d’une œuvre qu’il convient de relire. Loin de n’être qu’un épigone médiocre de son ami Flaubert ou même un traitre à la cause flaubertienne, Maxime Du Camp qui aura été plus un narrateur ou un conteur qu’un romancier, un théoricien de la poésie qu’un poète, un penseur qu’un moraliste, un sociologue qu’un historien, a écrit et publié de nombreux textes, dont la richesse tant quantitative que qualitative peut représenter une autre manière de faire de la littérature au XIXe siècle.
Ce volume, consacré à Maxime Du Camp, se propose sans volonté de réhabilitation ni perspective strictement historique ou sociologique. L’objectif premier qu’il poursuit consiste dans la volonté de mesurer l’ampleur d’une œuvre aujourd’hui peu lue même si quelques entreprises de réédition ont vu le jour ces trente dernières années. Maxime Du Camp appartient définitivement à |