Si Giono est bien connu comme romancier, il a moins retenu l’attention comme auteur de nouvelles. Ce volume, centré sur Les Récits de la demi-brigade – recueil qui illustre de façon exemplaire l’art accompli avec lequel l’auteur s’est approprié le genre –, ne s’y limite pas et aborde aussi des textes de Solitude de la pitié, de L’Eau vive et de Faust au village, ainsi que des récits brefs publiés hors de tout recueil. Giono lui-même estimait ne pas être « très à [s]on aise dans la nouvelle » et s’attribuait plus de talent pour un long roman que pour un “petit texte”. Il n’emploie guère le mot nouvelle, et certains de ses récits brefs pourraient d’ailleurs être lus comme des contes. Cet ensemble de textes méritait pourtant qu’on examine ses contraintes propres et ses réussites spécifiques. L’intérêt majeur des études rassemblés dans ce volume est de montrer comment l’économie narrative de la nouvelle, par les choix esthétiques et thématiques qu’elle entraîne, l’a finalement conduit à renouveler son écriture et à reconstruire son image d’écrivain. |
Écrit en 1932, entre les deux premières pièces de théâtre de l’auteur et Solitude de la pitié, en amont, et Le Serpent d’étoiles, en aval, Jean le Bleu est dans la production du Giono des années Trente une œuvre atypique. Son statut générique est incertain : autobiographie ? roman ? En outre, conçu par l’auteur comme « une œuvre refuge » (Robert Ricatte), ce livre reste profondément marqué par la mélancolie caractérisant la grave crise morale qu’il traverse de 1930 à 1934. C’est sans doute à cette place à part dans la création gionienne que Jean le Bleu doit d’avoir été jusqu’ici relativement peu exploré par la critique.
Les cinq études que rassemble cette livraison se proposent donc de combler un manque. Chacune jette sur l’œuvre un éclairage complémentaire de celui des quatre autres. Michel Gramain dresse un bilan complet de la réception du livre dans la presse de l’époque. Christian Morzewski s’intéresse à la « valeur matricielle » d’un texte qui entretient d’étroites relations avec d’autres œuvres de Giono, tant antérieures que postérieures. Frédérique Parsi montre l’importance décisive de la place et du rôle de la musique dans ce roman d’initiations. Marie-Anne Arnaud Toulouse observe que la société décrite dans ce récit d’enfance est profondément marquée par la religion catholique, mais que celle-ci |
Roman du romancier, œuvre inclassable, somptueusement baroque, Noé (1947), dans la foulée d’Un roi sans divertissement, est une tentative prodigieuse de Jean Giono pour bâtir un monde – une arche-texte, bardée de digressions et d’intertextes qui jettent leur réseau tentaculaire sur le désert de la page – aussi proliférant, démesuré et labyrinthique que le vrai, où il puisse goûter au vertige irremplaçable de se perdre en se frottant au gouffre du “fond des choses” par texte interposé. Car il le fait en “avare”, c’est-à-dire non seulement sans mourir encore, mais en refusant aussi d’être la dupe de la méprisable comédie sociale que les “temps modernes” ont substituée à la souveraine confrontation de l’individu avec le monde.
Sommaire
1. Noé. Réception de l’œuvre, par Michel GRAMAIN
2. Noé ou à chacun sa réalité, par Joëlle GARDES 3. L’exotisme du vivant dans la ville gionienne : essai d’approche écopoétique de Noé, par Alain ROMESTAING 4. Noé ou les réécritures de Jean Giono : l’intertexte dans tous ses états, par Jean-Paul PILORGET |
Jean Giono 9
|
avant-propos, par Laurent Fourcaut I. QUE MA JOIE DEMEURE 1. La Réception de Que ma joie demeure, par Michel Gramain. 2. Échos et résonances évangéliques dans Que ma joie demeure, par Jean-Paul Pilorget. 3. Bobi mythe ou de la joie au divertissement, par Christian Morzewski. 4. Les Apories de la temporalité dans Que ma joie demeure, par Denis Labouret. 5. Jean Giono et le métier à tisser de Que ma joie demeure, par Jacques Le Gall. 6. Un Texte extraordinaire?, par Laurent Fourcaut. II. BIBLIOGRAPHIE Que ma joie demeure, bibliographie de la critique, par Laurent Fourcaut. III. CARNET CRITIQUE |